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Pourquoi le Guernica de Picasso est-elle son œuvre la plus influente ?

24 May, 2022
Il y a quatre-vingt ans de cela, Pablo Picasso reçu une commande qui changea sa carrière pour toujours. Il en créera Guernica.

La république espagnole – en pleine guerre civile contre le futur dictateur Franco, demanda à Picasso, entre autres artistes proéminents de l’époque, de créer un tableau pour son pavillon à l’Exposition Internationale de Paris de 1937. L’œuvre qu’il composa fut Guernica, le tableau de la taille d’un mural maintenant bien connu, inspiré par le bombardement du petit village basque du même nom.

 

Bien que nombrent des œuvres de Picasso étaient déjà considérées comme des chefs d‘œuvres – comme «Les demoiselles d’Avignon» (1907), censé avoir lancé l’art abstrait en Europe – le Guernica de Picasso se démarque des autres créations de l'artiste.

 

Picasso et la création de Guernica

 

Les expériences artistiques qui ont mené à Guernica

 

Dans le milieu des années 20, alors qu’il commençait à s’intéresser au Surréalisme, il peignait des intérieurs avec des natures mortes, mettant en avant des objets comme les instruments de musique ou des fruits. Au début, ces travaux étaient porteurs de plaisir. Mais, comme Wagner l’explique, les scènes d’intérieur deviennent graduellement claustro-phobiques « Son plaisir semble devenir carbonisé et brulé », dit-elle, « La toile devient un théâtre de drame. »

 

La transition s’effectua pendant que l’Europe se remettait de la 1ʳᵉ guerre mondiale, les années précédant le crash de 1929. Durant cette période, Picasso et les Surréalistes exploraient les recoins sombres de la psyché. « Picasso savait très bien qu’être humain, c'était être confronté à la terreur, la tragédie, les excès et la violence ; et il croyait dur comme fer que la psyché est l’endroit où se révèle le subconscient.»

 

Les trois danseurs(1925), est un exemple parfait du travail de Picasso pendant cette période. « C’est un tableau plein d’excès ; pour Picasso, ce qui est maintenant dans la pièce ce ne sont pas des natures mortes, mais des corps de femmes, traités de manière immensément complexe et étrange », nous dit Wagner.

 

Fameux pour ses relations avec les femmes, Picasso fait des portraits affectueux des ses amantes pour ses œuvres privées, mais pour les autres, il s’en détache de manière notable.

Pour ses œuvres publiques, il considérait comment les corps de femmes pouvaient être monumentaux ou architecturaux ; comment elles pouvaient devenir des trappes ou des machines ; comment elles pouvaient représenter une autre réalité, et aussi comment elles pouvaient être monstrueuses. Dans les années menant à Guernica, les croquis et tableaux montrent d’évidence la rumination sur le symbolisme qui peut être utilisé au travers de la manipulation du corps féminin – expérimentations qui culminent en Guernica.

 

Malgré les spéculations qui voudraient que Guernica ait été crée très rapidement, le concept n’est n’est pas tombé du ciel. C’est le résultat d’années de création artistiques et de l’intérêt de l’artiste pour la politique de l’Espagne, où sa famille vivait.

 

Picasso reçoit la commande

Bien que les pavillons Allemands et Russes à l’Expo de 1937 aient été d’immenses structures architecturales représentant l’autorité et le pouvoir, la République Espagnole, entré il y a un peu moins d’un an dans la guerre civile, opta pour une structure modeste, efficace, remplie d’oeuvres d’art de classe mondiale.

 

Connu pour son respect des artistes et des intellectuels, la République enrôla des créateurs qui tenaient le devant de la scène avant-gardiste des années 30. Picasso reçu une commande pour une peinture à la taille d’un mural en Janvier 1937.

 

Les travaux commandés pour le pavillon devait servir de véhicule politique, commandés par un régime anti-fasciste ; malgré cela, le projet original de Picasso se voulait a-politique. D’après Wagner, l’artiste était complètement incertain de ce qu’il allait pouvoir peindre. Les premiers croquis dépeignent un artiste dans son studio, faisant face à un modèle nu, incliné sur un sofa.

 

Ce fut la tragédie qui lui inspira le changement.

 

Le bombardement de Guernica et la réalisation de Guernica

Le 26 Avril 1937, Franco ordonne à la Légion Nazie « Condor » (envoyée par l’Allemagne) de lâcher des bombes sur le petit village de Guernica. C’était un jour de marché ; les civils, principalement des femmes et des enfants, était rassemblés sur les places publiques. En tant que premier endroit où la démocratie avait été établie dans la région Basque Espagnole, le village était une cible symbolique. Le bombardement brutal, qui tua des centaines de personnes (les chiffres sont contestés, mais les rapports varient entre 200 et 1700) et en blessa environ 900 autres, étaient le premier de cette guerre civile où une ville sans défense serait attaquée.

 

Une des choses dont on s’aperçoit de suite dans l’ensemble des images prise de la guerre civile Espagnole, est qu’il y a avait une grande sensibilisation du publique par rapport à ce qui arrivait aux corps des civils – femmes et enfants. Effectivement, la guerre civile Espagnole fût la première guerre à voir la presse photographier les corps, mutilés ou morts, sur les lignes de front, et , comme beaucoup d’autres, Picasso ouvrit son journal le 27 Avril pour y trouver des images dévastatrices de la destruction de Guernica.

 

Bien que Picasso était déjà connu pour être gauchiste – il avait réalisé une paire de gravures intitulées Le rêve et le mensonge de Franco (1937), qui furent reproduitent et vendues pour lever des fonds pour la République – le bombardement le toucha avec une force particulière. Et le 1er Mai, il se rendit à son studio rue des Grands Augustins pour commencer de nouveaux croquis pour sa commande.

 

Le travail fût terminé mi-Juin ; l’artiste Surréaliste Dora Maar captura plusieurs des variations qu’avait subit la peintures en photo. En Juillet, Picasso livra la toile finie au pavillon de la République, où elle devint rapidement la pièce maitresse, avec à ses cotés La Fontaine de Mercure de Calder et La moissonneuse de Miro.

 

Une scène de la tragédie Humaine

Guernica représente un enchevêtrement frénétique de six figures Humaines (quatre femmes, un homme et un enfant), un cheval et un taureau ; la scène se place dans l’ambiance claustrophobique d’un intérieur à plafond bas, sous une lampe surchauffée qui semble éclater de lumière. Bien que l’on y retrouve des indices du projet originel (l’intérieur du studio d’un artiste), on comprend d'emblée que la scène est la conséquence émotionnelle et physique de la guerre et de la violence.

 

Bien que Picasso n’ait jamais expressément explicité le sens du tableau au public (Il dira : « C’est au public d’y voir ce qu’il veux y voir »), la plus grabnde partie de l’oeuvre peut être prise littéralementt. En même temps, les historiens de l’art, depuis des décennies, s’arrachent les cheveux sur l’intention qui est derrière chaque coup de pinceau.

 

Ce que l'on voit en premier est l’expression contorsionnée des femmes, souffrant une agonie physique et une angoisse mentale. On peut voir de quel type de déformation se sert Picasso en tant que dispositif pour révéler la peine er la souffrance ; il exprime leur désespoir avec des langues pointues et acérées, et leur chagrin au travers d’yeux en forme de poires.

 

Tout à gauche, une femme gémit en direction du ciel, en tenant un enfant flasque et sans vie dans ses bras ; une autre hurle, les bras tendus en l’air alors qu’elle est consumée par les flammes ; une autre encore, émerge d’une fenêtre ouverte en tenant une torche. Cette troisième femme est de temps en temps interprétée comme un signe d’espoir. Chaque femme est représentée dans des formes amorphes et des angles projetés, leurs corps à la fois soudés dans leur ensemble et tombants en morceaux.

 

Au sol, un personnage qui a été identifié comme un soldat, git, ses membres détachés : peut-être un symbole de la République. Ses bras démembrés sont balafrés de coupures croisées. Une main forme un poing serré – un symbole de la République – autour d’une épée cassée.

 

La lampe plafonnier à été interprété comme symbole d’une bombe, bien que certains aient pu y voir le symbole de l’oeil de Dieu – en forme d’oeil, avec l’ampoule comme iris.

 

Le taureau et le cheval ont inspirés de multiples interprétations. La plupart remontent au rôle de ces animaux dans la tradition Espagnole de la corrida, où le cheval peut devenir un dommage collatéral, et le taureau être blessé jusqu’à en mourir. Contrastant cette interprétation, d’autres ont théorisé que le taureau, avec son manque d’expression physique et émotionnelle, est un emblème du fascisme ou de Franco. D’autres croient encore que le taureau représente l’héritage Espagnol – un témoin stoïque et inébranlable de la tragédie.

 

Le langage visuel de Picasso, cependant, transcende la particularité d’une seule tragédie Espagnole pour devenir universel. C’est grandiose et intense et spécifique – vous savez que ce qui arrive est en rapport avec la souffrance et la mort. Mais vous ne pourriez dire : ‘Ha, c’est en Espagne !’. Il a de nombreuses applications parce qu’il semble être approprié a tant de contextes différents.

Il vous fait sentir un peu de la tragédie de l’existence Humaine. Si vous pouvez ressentir en même temps terreur et pitié pour cette situation critique, vous être entré de plein fouet dans cette expérience.

 

Guernica dans l’imagination du public

Après l’exposition de Paris, Guernica fit un tour d’Europe. À la fin de la guerre, alors que Franco avait pris le pouvoir et que la République s’était écroulée, la toile continua de voyager, et aida à récolter des fonds pour les réfugiés de la République Espagnole qui avait quitté le pays. Elle était la vedette de l’exposition Picasso au MoMA de New-York, et Picasso stipula que le MoMa devait en devenir le gardien.

 

Entre 1939 et 1952, Guernica voyagea entre diverses institutions au travers des États Unis ; après cela, elle fût exposée au Brésil et un peu partout en Amérique du Sud - jusqu’en 58, où elle revint au MoMA et fût déclarée impropre à voyager de nouveau. Des décennies de transport, le fait de tendre et retendre la toile en de nombreuses occasions, avait laissé la toile dans un état précaire. Elle restera à New-York jusqu’en 1981.

 

C'est pendant cette période que Guernica connu une vie au-delà de la toile. Elle devint un symbole pour Dresden, Berlin, Hiroshima, synonyme d’endroits où des civils sans défense se sont fait attaquer. Et ce faisant, elle commença à prendre un sens particulier pour les manifestants anti-guerre.

On prend pour argent comptant le fait que Guernica est un symbole de la guerre moderne, on a trouvé des reproductions du chef d’oeuvre de Picasso portées par des manifestants tout autour du monde, de Calcutta à Ramallah en passant par la Caroline du Sud.

De plus, comme pour beaucoup de grandes œuvres d’art, les artistes contemporains commencèrent à s'inspirer de Guernica dans leurs propres œuvres, s’en appropriant les images pour répondre au thème de la guerre et de la violence.

 

L’héritage de Guernica

Pendant que Picasso était encore en vie, il compris le potentiel de Guernica. Dès 1939, dès le début de la seconde guerre mondiale, il fût surveillé par les Nazis, ceci dût en grande partie à la résonance qu’avait le message de Guernica.

 

L’anecdote veut qu’un soldat Nazi, visitant le studio de Picasso à Paris, et pointant du doigt un reproduction de Guernica, demanda à Picasso, « C’est vous qui avez fait ça ? », et Picasso de lui répondre : « Non, c’est vous ! »

 

Il devait défendre cette toile, elle devint quelque chose dont le destin l’inquiétait beaucoup. Il savait qu’il avait crée quelque chose d’unique, de grandiose et d’important, et il savait également que parce qu’il s’appelait Pablo il ne pourrait pas retourner en Espagne. Pour assurer la sécurité de la toile, il fît établir un document légal, stipulant que l’oeuvre ne devrait pas retourner en Espagne avant qu’une Démocratie y soit établie.

 

En 1981, six ans après la mort de Franco, et huit ans après la mort de Picasso, Guernica retourna finalement en Espagne. Toujours une force galvanisante pour la nation, qui se remettait de 40 ans de dictature, elle fût exposée derrière une vitrine pare-balle.

 

La vitrine fût retirée en 1995, mais la puissance politique de Guernica n’as pas vacillé. En 2003, par exemple, une controverse agitée naquis du fait qu’une tapisserie représentant Guernica fût recouverte d’un drap bleu. Elle aurait sinon été la toile de fond pour le speech de Colin Powell alors qu’il proposait un enrôlement des forces armées Américaines en Iraq.

 

Picasso continua à réaliser des œuvres à tendance politique significatives après Guernica, bien qu’aucune n’acheva sa célébrité et son impact politique. Guernica est devenue une marque de l’humanité, un message qui est toujours compris par les gens du monde entier.

 

Le Guernica de Pablo Picasso, est une œuvre de circonstance essentielle dans son impact pour l'artiste et l’histoire de l’art, l’art Républicain, l’art protestataire et l’Humanité.

Tag(s) :  Picasso , Tableau